lettre d'amour
J'étais allée te chercher dans le froid glacial de février. Plus tard Il y eut des jacinthes sur la table et j'avais planté des jonquilles sur le balcon. Le printemps pointait fébrilement son nez et parfois tombait encore la neige. Arriva mon anniversaire. Caspar dans mes bras, tu m'as regardé avec douceur. C'est peut-être là que j'ai sentit pousser en mon cœur comme un début de sentiment. Mais mon cœur était encore ravagé des dernières tempêtes et je m'empressais donc d'éteindre ce début de flamme avant qu'elle n'incendie mon corps entier. Les mois ont passés et ton sourire me suffisait. Les sentiments s'étaient tus. Je les avais plus ou moins oubliés. Tout allait très bien jusqu'au jour où tu nous as appris que ta galerie fermait. Les images ont défilées à toute allure dans ma tête. Je te voyais partit, retourné au delà de l'océan. La journée me rongea les sangs et je sentis au fond de moi que les sentiments qui s'étaient tus étaient au bord, tout au bord, aux frontières de mon cœur. Tu me manquais déjà. Des jours passèrent et tu étais toujours là, tu ne parlais pas de quitter Berlin. Mes sentiments poussaient. Une fois de plus je les fis muets. Il le fallait. Tu vivais ta vie et la partageais. Je ne comptais pas les pincements que me faisait le nom de tes conquêtes. De ces petits pincements, j'en pris l'habitude. Cahin, caha le temps passait. Vint l'été et notre voyage vers ma terre d'origine. La parenthèse se referma enlaçant un bonheur confus. Au bord du cœur toujours mes sentiments pour toi flottaient. Et puis les lignes de flottaisons se troublèrent et plus rien ne fut clair. La semaine qui suivit fut empreinte de toute sortes de choses, tu étais là, frère, ami, mystère, amant. Je sentais poindre le danger de perdre mon cœur dans une énième tempête, et, par peur de me voir une fois de plus dans le reflet de mes larmes, je décidais fermement de ne pas t'aimer. Je me suis retirée, je t'ai évité. Au point où je t'ai presque détesté. Parce qu'il est toujours plus facile de détester que d'aimer en silence. Alors nous nous sommes croisés, chaque jour, comme avant, bonjour, bonsoir, un sourire dans le couloir, quelques mots dans la cuisine. J'ai caché, enfoui bien au fond ce qui aurait pu être de l'amour et j'ai ainsi évité le pire.
Aujourd'hui tu t'en va, tu lis ces lignes et je sais que je ne t'apprends rien.